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Chas Freeman : la responsabilité américaine dans le nouveau désordre mondial

Chas Freeman

ancien ambassadeur des Etats-Unis en Arabie saoudite et interprète principal de Nixon lors de son déplacement en Chine en 1972


 

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Les choses se disloquent : les États-Unis, l’Europe et l’Asie dans le nouveau désordre mondial

Nous sommes entrés dans un monde où, comme William Butler Yeats l’a dit en 1919 :

Tout se disloque ; le centre ne peut plus tenir ;
L’anarchie élémentaire est déchaînée sur le monde.

En Europe, aux États-Unis, dans certaines parties de l’Asie, un sens d’appréhension règne – un sentiment de malaise quant à l’avenir. On constate une dérive contrariante au sein d’une paralysie politique. La démagogie monte ; la puanteur du fascisme est dans l’air.

L’évolution de la politique américaine est particulièrement déconcertante. Le peuple américain vient d’ouvrir, hélas très tard, la discussion sur le rôle des États-Unis dans le monde. Nous autres Américains aurions dû avoir cette conversation il y a vingt-cinq ans, quand l’Union soviétique s’est dissoute et la Guerre froide touchait à sa fin. Aujourd’hui, nous exprimons nos différends sur la politique étrangère dans le contexte d’incertitudes décourageantes dans le monde de la politique internationale et de l’économie. Peu sont capables même de se rappeler aujourd’hui l’optimisme qui a prévalu lorsque l’Allemagne s’est réunifiée, que l’Europe est devenue Une et libre, que la Chine a rejoint le monde capitaliste, et la Russie aspirait à se démocratiser et à faire de même.

Presque personne ne voit grande chose à admirer aujourd’hui dans les résultats de la politique étrangère américaine depuis ces événements. Une poignée affirme que notre utilisation de la force aurait dû être plus vigoureuse et soutenue, mais la plupart croit que les interventions militaires récentes des États-Unis ont été contreproductives. Un nombre croissant d’Américains affirment leur scepticisme sur les interventions à l’étranger.

Dans un monde d’ambiguïtés, le choix est posé de façon binaire. Êtes-vous pour ou contre l’utilisation de la puissance militaire des États-Unis ? Or, il reste à tirer clairement les lignes entre les deux côtés. Le débat se répand dans le cadre d’une campagne électorale dominée par le mal-être national, auquel la politique étrangère est au mieux marginale. La discussion sur les missions et les responsabilités internationales des États-Unis ne fait que commencer. Elle est incohérente et aussi troublante pour les Américains qu’alarmante pour les alliés, partenaires et amis outre-Atlantique.

Les Américains ont du mal à formuler des approches alternatives en politique étrangère, mais ils ne veulent définitivement pas continuer à faire la même chose. Ils peuvent avoir des désaccords sur ce que « la même chose » veut dire. Mais quoi qu’il soit, la plupart n’en veut pas. A cet égard, les Européens ne semblent pas très différents.

Tout le monde a conscience que des transformations majeures dans la distribution de la richesse et du pouvoir ont lieu au niveau mondial. Un malaise omniprésent explique l’engouement de beaucoup en Europe et aux États-Unis pour des slogans vides de sens, présentés comme de nouvelles idées sur la façon de gérer les frontières, les migrants, le commerce extérieur et les investissements, les relations avec les alliés et les adversaires et les innovations dans l’ordre international existant. Le marasme économique né de l’impasse politique, les échecs législatifs en matière de politique fiscale, la politique monétaire radicale mais improductive, la propagation de l’autoritarisme, l’antipathie renouvelée entre l’Ouest et la Russie, et les nombreux discours de bas niveau prononcés par des politiques ambitieux mais intellectuellement déficients aux États-Unis et en Europe – tout cela ajoute aux incertitudes.

L’effondrement de la Pax Americana contribue de façon importante au nouveau désordre mondial. C’est énervant pour les Américains ainsi que pour les alliés et les partenaires des États-Unis à l’étranger. Le mieux que l’on puisse en dire est que parfois il désoriente aussi les adversaires des États-Unis. Mais là encore, il y a absence d’accord sur qui sont ces adversaires et plus encore sur ce qu’ils veulent.

Avec la disparition du totalitarisme messianique, les Américains ont succombé au syndrome d’absence d’ennemi. C’est le sentiment désagréable de désorientation qu’on peut avoir lorsque son propre establishment militaro-industriel n’a plus d’ennemi évident sur lequel se focaliser. La diplomatie européenne a traditionnellement accepté que les alliés sur certaines questions, peuvent être des adversaires sur d’autres, que le pouvoir militaire n’est pas en soi une solution à bien des problèmes, que les intérêts à long terme peuvent exiger des sacrifices à court terme, et qu’il est souvent plus sage de concilier au lieu de confronter ceux qui cherchent des modifications limitées de l’ordre existant. Mais ce sont des réflexions nouvelles pour les Américains formés à l’école des relations internationales pendant la Guerre froide, lorsque la diplomatie ressemblait plus à la guerre des tranchées qu’à la guerre de manœuvre.

A bien des égards, la longue compétition avec l’URSS a fait des États-Unis un « cheval connaissant un seul tour ». Washington a appris à recourir à la dissuasion militaire et à la punition au moyen de sanctions avant d’envisager l’appel à la diplomatie pour éliminer les sources de désaccords à l’origine des dangers qu’il tente de prévenir. Et la dissuasion est problématique, non seulement en raison du risque de guerre par accident et du fait qu’elle ne marche pas toujours, mais aussi parce qu’elle immobilise et retarde les conflits potentiels plutôt que s’adresser à leurs causes. La dissuasion empêche le conflit immédiat en gagnant du temps pour la diplomatie. Mais sans diplomatie, la dissuasion ne fait que repousser les troubles au plus tard, au moment où les chances favorisent l’un ou l’autre côté. C’est le cas en particulier quand les équilibres de pouvoir sont en fluctuation rapide, comme dans le cas de l’Inde-Pacifique.

Les Américains semblent commencer peu à peu à se rendre compte que résoudre les problèmes sous-jacents conduisant adversaires vers le combat est une meilleure approche du maintien de la paix, que d’essayer de gérer le risque en promettant de répondre par la force à l’utilisation de la force. Si c’est le cas, c’est une évolution saine dont tout le monde devrait se réjouir. Elle offre de nouvelles opportunités aux alliés et partenaires des États-Unis pour tirer profit du pouvoir encore énorme de l’Amérique pour façonner, diriger et maintenir un meilleur futur que celui qui risque autrement de sortir du désordre global actuel.

Mais du point de vue américain, les alliés de Washington semblent plus confus que jamais. Les Européens parlent en différentes langues et de façon contradictoire. Le vote sur le Brexit vient exacerber la confusion européenne. Le Brexit promet de briser l’ordre de l’après-guerre en Europe, d’écarter les Britanniques du rôle d’intermédiaires qu’ils ont joué entre les États-Unis et le « Continent », et de frapper un coup potentiellement fatal à la relation spéciale des Britanniques aux deux. Ce au moment où des propositions mal conçues pour renégocier les relations transatlantiques et trans-pacifiques avec les États-Unis, les règles du commerce mondial, et les relations États-Unis-Russie et États-Unis-Chine, se font entendre dans la campagne présidentielle américaine.

Un nombre croissant d’Américains comprend que, si les États-Unis n’écoutent pas les voix de leurs alliés, il viendra un temps où ils n’en auront plus. Mais d’autres demandent comment des pays qui dépensent relativement peu dans leur propre défense, préférant la laisser a l’Oncle Sam, peuvent être considérés comme des alliés, plutôt que de simples protectorats. « Les Alliés » sont des pays ayant des obligations et responsabilités mutuelles, non une dépendance d’un seul côté. L’utilisation à la légère du terme « allié » masque le fait notamment en Asie ou au Moyen Orient, que les États-Unis ont des vassaux et des États-clients qu’ils protègent unilatéralement, et non pas des « alliés » engagés dans une défense commune.

En revanche, les États-Unis ont toujours cherché des « alliés » en Europe, pas de satrapies ou encore moins de lèche-bottes. C’est pourquoi les Américains ont beaucoup soutenu « le projet européen ». A mesure que l’effort d’unifier l’Europe faiblit, il en est de même de l’espoir des États-Unis de voir l’Europe éviter le retour aux déséquilibres du pouvoir et aux effondrements politico-économiques qui avaient, en trois occasions au siècle dernier, nécessité l’intervention des États-Unis pour la secourir et finalement en faire une forteresse.

Pour parler franchement, dans les circonstances actuelles, pour continuer d’être considérés comme des alliés et écoutés à ce titre par les Américains, les Européens doivent changer leurs attentes envers eux-mêmes et envers les États-Unis. Ils doivent contribuer plus à leur propre défense et formuler et communiquer des conceptions cohérentes de ce qu’ils demandent ou pas des États-Unis pour compléter leur propre pouvoir militaire. Ils doivent se donner les moyens de persuader le peuple américain que c’est dans son intérêt que les Européens obtiennent ce qu’ils demandent. (La même chose est vraie pour les partenaires non-européens tels que le Japon et la Corée du Sud). Pour le mieux ou pour le pire, le monde est entré dans une ère de relations transactionnelles, et non plus de coalitions basées sur la confrontation contre un ennemi global commun ou des engagements mutuels envers des intérêts et des visions stratégiques partagées.

L’appel à justifier une fois de plus, et en même temps à restructurer les garanties de défense des États-Unis à l’étranger vient nous rappeler que, pendant 160 ans, les États-Unis avaient, avec grande précaution, évité des « alliances trop contraignantes ». Cette position a pris fin seulement en 1949 lorsque les États-Unis ont rejoint le Canada et 10 nations européennes pour former l’OTAN. Washington a ensuite cherché à contrer la menace perçue que l’URSS de Staline pourrait tenter de dominer – voire de conquérir – pas seulement l’Europe, mais le monde au-delà de l’hémisphère ouest se construisant une puissance dans le Vieux Monde au point de pouvoir poser un défi existentiel au Nouveau. Mais l’Union Soviétique n’est plus. Malgré tous les efforts pour présenter la Russie comme un prédateur implacable, l’Europe ne fait face à aucune menace comparable à celles d’autrefois.

Avec le soutien des États-Unis, l’Europe s’est rétablie de la Deuxième guerre mondiale et a renforce sa culture politique. Elle a bénéficié d’un quart de siècle de paix, de prospérité et d’expansion de l’État de droit depuis la fin de la Guerre froide. L’Europe est peut-être bien moins que la somme de ses parties, mais elle n’est pas faible. Rien que les membres européens de l’OTAN ont une population quatre fois plus importante que celle de la Russie et un PNB au mois 9 fois plus important. Leurs budgets militaires sont en-dessous des exigences de l’OTAN mais ils dépensent au moins trois fois plus pour la défense que la Russie. Certains maintiennent des forces armées formidablement efficaces. Les Européens n’ont plus besoin de continuer à dépendre des forces américaines pour leur défense. Dans ce contexte, il n’est pas surprenant qu’un nombre grandissant d’Américains estiment qu’il est temps de rééquilibrer l’alliance transatlantique.

Certains se demandent : « si l’OTAN reste la réponse, quelles étaient les questions ? » Mais loin de vouloir se séparer de l’Europe, la plupart des Américains veulent une relation de sécurité plus égale avec elle. Ceci en raison du fait que trois guerres dans le XXe siècle (deux chaudes et une froide) ont montré que :

  • L’Europe et les États-Unis sont une zone géopolitique unique dans laquelle la sécurité et le bien-être de chacun sont liés de façon inextricable à l’autre.
  • Une architecture de sécurité européenne est nécessaire pour maintenir une coopération en matière de sécurité et la paix parmi les Européens.
  • Les États-Unis doivent être liés à cette architecture pour défendre leur intérêt vital dans la stabilité de l’Europe et de l’Eurasie.
  • L’Europe a besoin de la participation américaine à la sécurité européenne pour éviter la domination de sa plus grande puissance, l’Allemagne, et lui permettre l’équilibre et la coexistence avec la Russie.

Ces réalités créent un cadre incontournable pour la coopération transatlantique, mais elles ne se feront pas par elles-mêmes. Elles sont affaiblies par le Brexit et autres tendances « séparatistes » ailleurs en Europe. Elles ne conduisent pas automatiquement à une sécurité coopérative, à des relations coopératives avec la Russie ou la Turquie, ou à une stabilisation des zones frontalières entre l’Eurasie et l’Europe. L’élaboration de tels arrangements exige un art de la politique qui a brillé par son absence depuis la fin de la Guerre Froide.

La paix et la stabilité en Europe et en Eurasie veulent que l’Europe et la Russie reconnaissent que toutes deux ont un intérêt vital dans une Ukraine unie, prospère et indépendante. Une telle Ukraine ne peut émerger sans que toutes deux fassent preuve de retenue et d’apaisement. Un modèle en est le Traité de l’État Autrichien de 1955, qui établit l’Autriche comme nation souveraine et démocratique avec des garanties pour les minorités ethniques. L’Autriche a cimenté sa liberté en déclarant sa neutralité permanente entre l’Est et l’Ouest et en développant une force de défense nationale crédible. Si ceci a pu être fait pour l’Autriche au plus fort de la Guerre Froide, on peut le faire pour l’Ukraine dans des circonstances bien moins conflictuelles.

Il serait dans l’intérêt de tous, surtout des Ukrainiens, d’établir l’Ukraine à la fois comme une zone tampon et comme un pont entre l’Europe et la Russie. Européens et Russes ont démontré au-delà de tout doute que les deux côtés sont prêts à frustrer et à punir les tentatives de l’autre pour absorber ou dominer l’Ukraine. Les États-Unis ont démontré qu’on peut compter sur eux pour soutenir l’Europe militairement en résistant à une invasion russe de l’Ukraine. Le résultat est une impasse dangereuse mais aussi une chance. Les deux côtés ont épuisé les mesures coercitives. Aucun ne peut espérer gagner quoique ce soit de substantiel de la poursuite d’une compétition pour la domination en Ukraine. L’escalade entre l’OTAN et la Russie est coûteuse et risquée. Elle mène là où aucun des deux ne veut aller. Négocier des garanties mutuelles de l’indépendance et de la neutralité de l’Ukraine suivant le modèle autrichien reste l’option la plus intéressante.

Mais sans une vision partagée entre l’Europe et la Russie pour cadrer ce résultat, l’impasse persistera. Par conséquent, un grand compromis s’impose. Les retraits et les réformes mutuels stipulés dans les accords de Minsk fournissent un point de départ potentiel d’un processus diplomatique visant à consolider la place future d’une Ukraine indépendante entre l’Europe et la Russie. Comme à Minsk, l’Europe et non les États-Unis est plus qualifiée pour conceptualiser et diriger un tel processus qui doit s’insérer dans une vision plus large de la sécurité coopérative en Europe.

Une diplomatie américaine intelligente accueillerait une participation russe à la gouvernance des affaires en Europe et dans toute la masse continentale eurasiatique, au lieu d’y résister. Il existe de nombreux cadres institutionnels à cette fin, dont l’OSCE, le conseil Russie-Otan, le Conseil de l’Europe, l’Organisation de coopération de Shanghai, et d’autres. La réintégration de la France post-révolutionnaire dans le Concert de l’Europe après les guerres Napoléoniennes a montré comment l’inclusion d’anciens adversaires dans le processus décisionnaire peut favoriser une paix à long terme et la stabilité en Europe. L’exclusion de l’Allemagne post-Wilhelmine et de la Russie post-tsariste des conseils de l’Europe après la Première guerre mondiale n’a pas très bien marché. Cette expérience met en évidence le danger d’exclure de grandes puissances d’un rôle approprié dans la gestion des affaires dans lesquelles elles ont un intérêt légitime.

Les États-Unis, l’Europe et la Russie doivent aussi s’adapter à un monde dans lequel la Chine et l’Inde rejoindront le Japon, en tant que nations ayant une portée globale. C’est un ajustement particulièrement difficile pour les États-Unis. Ils ont dominé le Pacifique occidental pendant 71 ans. Ils sont habitués à être le gardien du bien commun et l’indispensable arbitre des disputes dans la région. Maintenant, ils doivent s’accommoder d’une Chine montante, une Inde plus affirmative, et un Japon plus indépendant.

Les institutions existantes, telles que l’ASEAN, sont divisées et inefficaces pour ce qui est de la gestion de ces affaires. Les changements d’équilibres de pouvoir en Asie-Pacifique sont pour la plupart provoqués par l’économie. En revanche, le prétendu « rééquilibrage vers l’Asie » est presque entièrement militaire. Les États-Unis, le Japon et la Chine se crient entre eux sans se faire entendre. Mais un processus fragmentaire d’accommodation se met en place sur fond de propos très exagérés concernant des disputes territoriales maritimes qui ne concernant pas les États-Unis.

Les asymétries énormes entre les enjeux pour la Chine et pour les États-Unis, sont dangereuses. Pour paraphraser le commentaire prescient de Bismarck sur les Balkans vingt six ans avant la Première mondiale : « toutes les pierres, les récifs, les bancs de sables, ne valent pas la vie d’un seul marin américain ». Mais s’il devait y avoir une nouvelle guerre en Asie, elle sortirait d’une satanée petite chose dans les mers de Chine du Sud ou orientale. La guerre peut avoir lieu même quand elle ne fait aucun sens. En Asie, comme en Europe, il y a un besoin urgent de substituer la diplomatie aux approches militaires qui ne résolvent rien mais risquent beaucoup.

Alors que les États-Unis luttent contre la Russie à l’Ouest et la Chine à l’Est, ces deux se rapprochent. Pour contrecarrer le partenariat sino-russe, le Japon courtise la Russie, mais avec une efficacité limitée. La Chine propose des ouvertures à l’Europe. Et la Chine, l’Europe, le Japon, la Russie et les États-Unis courtisent tous l’Inde, qui se fait prier. Le monde dans lequel nous sommes entrés comporte de multiples centres de pouvoir et équilibres régionaux concurrents, dans lequel une vision à long terme et l’agilité diplomatique à court terme sont de la plus haute importance.

Voilà le contexte global dans lequel la Chine a proposé d’intégrer toute la masse continentale eurasiatique à l’aide d’un réseau de routes, voies ferrées, pipelines, télécommunications, ports, aéroports et même des zones industrielles. Si le concept chinois d’ « une Ceinture, une route » est réalisé, il ouvrira une vaste région aux échanges économiques et interculturels, réduisant les barrières à la coopération internationale dans une zone de 65 pays, ayant 70% de la population mondiale et plus de 40% de son PNB, et générant bien plus que la moitié de sa croissance économique actuelle. Les coûts estimés des projets déjà à l’étude sont au moins onze fois les dépenses du Plan Marshall.

Ces projets d’infrastructure massifs promettent des accroissements majeurs de la vitesse des transports et des télécommunications, la réduction des prix, et la création de beaucoup de nouveaux emplois. Ils permettront d’intégrer la Russie et l’Asie centrale avec la Chine et l’Europe, connectant en même temps l’Asie du Sud par terre et par mer aux marchés et ressources naturelles des pays au Nord, aussi bien qu’en Afrique. En rendant le transport terrestre beaucoup plus efficace et en le liant à de nouveaux ports et aéroports, « Une ceinture, une route », modifiera l’équilibre entre la puissance maritime et terrestre, y compris dans les régions arctiques qui deviennent aujourd’hui plus accessibles grâce au changement climatique.

Le projet « Une ceinture une route » constitue la série de projets d’ingénierie la plus vaste que l’humanité ait jamais entreprise. Son potentiel de transformer la géoéconomie et la politique est proportionnel à son échelle. Il créera une arène plus grande pour la coopération et la compétition pacifiques que tout empire du passé, et il le fera sans conquête militaire ou recours à la force. Il offre ainsi un antidote à la myopie stratégique, au militarisme, et au grand jeu financier qui sont à l’origine du grand désordre mondial. C’est une alternative à « la même chose » que le monde devrait saluer et adopter.

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